mardi 7 octobre 2025

L’acceptabilité sociale de la transition écologique (volet 2) : urbanité et santé

Chapitre : Enjeux économiques et écoresponsables

Par : Laboratoire ESPI2R (unité de recherche du groupe ESPI) / Université du Québec à Montréal

ESPI Lyon, 95 rue Marietton 69009 LYON - Salle Confluence (Rez-de-Chaussée)

La transition écologique, malgré son urgence, est mise au défi d’inerties et de résistances au changement, donc de son acceptabilité sociale.
À ce titre, l’enjeu de la santé, avivé depuis la crise COVID, peut constituer un levier favorable aux transformations nécessaires des espaces urbains. Croiser les questions d’urbanité, placées aujourd’hui sous l’angle de la sobriété et de l’enjeu écologique, avec les questions des politiques publiques favorables à la santé doit permettre à la fois de faciliter la transition écologique et d’améliorer le bien-être des populations. Il en va de la capacité à se rétablir face aux aléas climatiques, aux pics de chaleur, mais aussi face aux risques pandémiques ou à l’exposition aux pollutions.
L’analyse portera ici sur la manière dont les sociétés urbaines et leurs acteurs sont capables d’articuler ces deux dimensions dans leur planification, et avec quels succès ou limites en termes de réception et d’équité socio-territoriale.

Programme

  • 09h00 ― Session 3 = l’impératif sanitaire dans les politiques urbaines de transition écologique, évaluation et mesures

    • Maikel ROSABAL RODRIGUEZ, Professeur, UQAM
    • Lucie ANZIVINO, Directrice de projets en santé environnement - Centre d'études et d'expertise sur les risques, l'environnement, la mobilité et l'aménagement - Cerema Centre Est/DTT/E, Cerema
    • Anne-Peggy HELLEQUIN, Professeure, Université Paris-Nanterre
    • François CROTEAU, PDG IRIU et Ancien maire, arrondissement Rosemont Petite-Patrie (Montréal), IRIU

    Session animée par Stéphanie Yates.

    Sujets abordés :

    • Maikel Rosabal Rodriguez :  Transition énergétique actuelle vue par un écotoxicologue : inquiétudes et défis

    La transition écologique vers une carboneutralité est de plus en plus nécessaire pour faire face aux enjeux environnementaux actuels, mais elle exerce une pression significative sur le secteur minier qui doit répondre aux besoins incessants en minéraux critiques et stratégiques (MCS). Le déséquilibre entre la production et l’offre actuelles, par rapport à la forte demande en MCS pour les nouvelles technologies, a conduit à une augmentation importante du nombre de projets d’exploration et d’exploitation de MCS dans plusieurs pays, incluant le Canada et la France. Actuellement, des rejets non négligeables de certains MSC dans l’environnement (urbain, minier et industriel) ont déjà été documentés, tandis que bon nombre de ces contaminants émergents (par exemple, les terres rares et les métaux du groupe du platine) ne font toujours pas l’objet de réglementations environnementales pour réduire leur impact. Dans cet entretien, je vous partage mes inquiétudes et surtout les défis scientifiques soulevés dans notre mission (en tant qu’écotoxicologue) d’évaluer et prévenir les effets toxiques de certains MCS associés à la transition écologique dans l’environnement.

    • Lucie Anzivino : Prise en compte des enjeux de santé dans les politiques d’aménagement du territoire

    Il est aujourd’hui reconnu que la santé ne se résume pas à une absence de maladie et que l’état de santé d’une population ne dépend pas uniquement de la qualité du système de santé qui lui est proposé. En effet, il est globalement tributaire des conditions dans lesquelles les personnes vivent et travaillent, dans la mesure où de nombreux facteurs, aussi appelés déterminants de la santé, liés à la fois à notre environnement physique, social et économique, peuvent influencer notre santé.  

    Les politiques d’aménagement du territoire sont autant de leviers pour promouvoir et améliorer la santé des habitants. Les choix en matière d’aménagement et d’urbanisme peuvent avoir un impact significatif sur la santé. Mais comment contribuer à renforcer l’exemplarité des projets en matière de santé, en allant au-delà des problématiques liées aux expositions environnementales ciblées ? Comment réussir le partage d’une culture commune autour de la santé de manière positive ? L’évaluation d’impact sur la santé ou EIS est un outil d’aide à la décision qui permet d’orienter les choix vers ceux qui sont les plus favorables à la santé, durables et équitables pour approfondir la compréhension des enjeux et contribuer à une culture commune pour une meilleure acceptabilité. 

    • Anne-Peggy Hellequin : Santé et transition, de la complexité de la mesure

    La transition correspond aujourd’hui à un horizon espéré de changement de la société, notamment dans les villes où vit la majorité de la population. Les liens entre santé et transition sont nombreux et complexes et se jouent à différentes échelles. Pourtant, elles sont consubstantielles et devraient être pensées ensemble. On peut envisager la question de la transition énergétique par exemple qui consisterait en une modification des sources d’énergie et une sobriété plus grande. L’usage des énergies renouvelables notamment a des effets directs et indirects sur la santé. Ainsi, directement la diffusion des voitures électriques a par exemple des effets sur au moins deux déterminants environnementaux de la santé que sont la qualité de l’air et le bruit. On peut citer aussi les effets indirects qui en réduisant les GES atténueraient le changement climatique et donc limiterait les effets de ce dernier sur la santé. Enfin, on sait qu’habiter près d’un transport en commun diminue l’usage de la voiture au profit de la marche (et du transport en commun) qui permet à son tour d’être en meilleure santé. Cependant, on le voit à partir de cet exemple, la mesure des relations entre transition et santé doit être vue dans une démarche systémique pour envisager aussi les effets en cascade et la multi-exposition. Cette communication envisagera différents liens entre santé et transition et la complexité de leur mesure, pourtant indispensable pour mieux garantir une meilleure qualité de vie à nos concitoyens.

    • François Croteau : Mesurer pour mieux soigner la ville

    La crise climatique est aussi une crise sanitaire. Canicules, pollution et insalubrité urbaine touchent d’abord les plus vulnérables, aggravant les inégalités sociales et territoriales. Pour rendre la transition écologique à la fois acceptable et efficace, il faut la fonder sur l’évaluation et la mesure. Des indicateurs clairs – hospitalisations liées aux canicules, qualité de l’air, îlots de chaleur, vulnérabilités socio-économiques – permettent d’orienter les politiques urbaines et de démontrer leurs bénéfices concrets en termes de santé publique. L’intelligence artificielle, lorsqu’elle est utilisée de manière éthique et explicable, offre un levier supplémentaire : anticiper les risques, simuler les impacts des interventions et aider les décideurs à prioriser les investissements. C’est l’esprit du projet VILLE_IA : fédérer des données multisectorielles pour transformer l’abstraction climatique en décisions locales concrètes, mesurables et équitables. En plaçant la santé au cœur de la transition écologique, nous passons d’un discours contraignant à une vision désirable : mieux respirer, mieux vivre, mieux protéger nos enfants.

  • 10h45 ― Table-ronde C = comment former à la transition écologique et à l’urbanisme favorable à la santé ?

    • Séverine ALLEGRA, Vice-présidente déléguée au Développement Durable et à la Responsabilité Sociétale de l’Établissement, Université Jean Monnet, Saint-Etienne
    • Alice FRISER, Professeure, Université du Québec en Outaouais
    • Bruno NEIL, Directeur général, Excelia
    • Samuel DEPRAZ, Directeur de la recherche et de la Prospective, ESPI
    • Corinne GENDRON, Professeure, UQAM
    • Donatienne DELORME, professeure associée en entrepreneuriat, stratégie et innovation, Excelia Business School

    Table-ronde coordonnée par Corinne Gendron.

  • 12h30 ― Conférence conclusive

    • Michel LUSSAULT, Professeur de Géographie, ENS de Lyon
  • 15h00 ― Visite de la ZAC de La Saulaie

    • Camille FIORUCCI, Directrice de projets, Groupe SERL

    Sujets abordés :

    • Camille Fiorucci :  La Saulaie – un urbanisme favorable à la santé 

    La requalification du quartier de la Saulaie à Oullins-Pierre-Bénite s’inscrit dans une logique de renouvellement urbain visant à concilier développement économique, mixité sociale et amélioration de la qualité de vie. Le territoire présente des enjeux de santé environnementale et sociale majeurs : pollution de l’air et des sols, nuisances sonores, risques d’inondation et technologiques, fragilité socio-économique de la population du quartier.

    Le projet urbain prévoit 870 logements (dont 60 % aidés), mais aussi bureaux, commerces, équipements publics et espaces publics requalifiés (réseau de parcs, nouvelles rues, places).

    La démarche retenue est celle de l’Urbanisme Favorable à la Santé (UFS), préférée à une simple évaluation des impacts. L’objectif est de sensibiliser les concepteurs aux déterminants de santé, de replacer l’humain au cœur du projet, et d’agir à toutes les échelles (bâti, espace public, quartier). L’UFS se fonde sur la combinaison de données statistiques et de retours habitants, garantissant une vision à la fois objectivée et sensible. Les orientations concrètes ont abouti à la création d’une maison de santé, au développement de mobilités douces, à une offre résidentielle qualitative et adaptée (seniors, lutte contre le bruit), et à de nouveaux espaces verts multifonctionnels répondant à divers enjeux de santé (sport, convivialité, fraîcheur), le tout porté par un principe de design actif et participatif.

    Les défis à venir concernent l’appropriation de la démarche par les concepteurs et entreprises, l’inscription durable dans les pratiques et la mesure des impacts dans le temps.

    Pour la visite, le lieu de RDV est à la maison du projet de la Saulaie – 7 avenue Edmond Locard à Oullins-Pierre-Bénite (station Gare d’Oullins, Métro B). La visite durera environ 2 heures.

Intervenants

Maikel ROSABAL RODRIGUEZ

Professeur

UQAM

Lucie ANZIVINO

Directrice de projets en santé environnement - Centre d'études et d'expertise sur les risques, l'environnement, la mobilité et l'aménagement - Cerema Centre Est/DTT/E

Cerema

Anne-Peggy HELLEQUIN

Professeure

Université Paris-Nanterre

François CROTEAU

PDG IRIU et Ancien maire, arrondissement Rosemont Petite-Patrie (Montréal)

IRIU

Séverine ALLEGRA

Vice-présidente déléguée au Développement Durable et à la Responsabilité Sociétale de l’Établissement

Université Jean Monnet, Saint-Etienne

Alice FRISER

Professeure

Université du Québec en Outaouais

Bruno NEIL

Directeur général

Excelia

Samuel DEPRAZ

Directeur de la recherche et de la Prospective

ESPI

Corinne GENDRON

Professeure

UQAM

Donatienne DELORME

professeure associée en entrepreneuriat, stratégie et innovation

Excelia Business School

Michel LUSSAULT

Professeur de Géographie

ENS de Lyon

Camille FIORUCCI

Directrice de projets

Groupe SERL